La lutte contre les ilots de chaleur est un défi croissant, du fait que ce phénomène, exacerbé par le changement climatique, est appelé à se reproduire de plus en plus fréquemment. Il survient dans les zones cumulant divers facteurs tels que le manque d'eau et de végétation, une architecture qui retient la chaleur et une densité de population élevée. L'élévation de la température locale touche alors un grand nombre d'habitants et de salariés, et est néfaste pour notre bien-être et notre santé. Découvrez les enjeux de la lutte contre les îlots de chaleur et les solutions possibles pour protéger notre santé et la qualité de vie dans nos villes.
L’ilot de chaleur, un phénomène accentué par le changement climatique
Un ilot de chaleur (ICU) est un phénomène météo du climat local, qui se traduit par une élévation et une accumulation de chaleur en comparaison avec le milieu environnant. Il s’agit d’une zone, d’un ilot urbain où se crée une bulle de chaleur, avec une température plus élevée d’environ 10°C le jour et 4°C la nuit. En effet, les îlots de chaleur peuvent être caractérisés par le fait qu’ils restituent la nuit, la chaleur accumulée le jour par des matériaux comme le béton.
Ces élévations de température locales sont dues à un ensemble de facteurs qui viennent se cumuler sur l’espace concerné : faible présence d’eau et de végétation, architecture réduisant la perméabilité au vent et produisant un effet canyon, matériaux à faible albédo (couleur foncée, faible réflexion de la lumière) qui stockent la chaleur, et la densité de population importante avec une activité ou une consommation d’énergie générant de la chaleur.
Penser la ville de demain en intégrant cette problématique des ilots de chaleur, c’est anticiper et s’adapter au réchauffement climatique. Celui-ci devrait se traduire par des températures globalement plus hautes, des épisodes ponctuels de sécheresse ou des périodes plus longues et plus fréquentes de canicules, ce qui aura pour effet d’exacerber les ilots de chaleur et leurs conséquences.
2 x plus de vagues de chaleur sont à prévoir en France d’ici 2050.
Au-delà d’impacter notre bien-être, l’exposition prolongée à de fortes températures présentes aussi des risques pour notre santé.
Un enrobé bitumineux exposé au soleil peut atteindre une température de surface de plus de 60 °C au pic d’une journée caniculaire. Dans les mêmes conditions, un granit clair ne dépassera pas les 40°C.
Lutter contre les Ilots chaleur pour protéger la santé et le bien-être
Limiter les effets d’ilot de chaleur est un enjeu de premier ordre pour conserver des milieux urbains agréables à vivre dans nos dans les villes, agglomérations et métropoles. En Île-de-France, environ 25% des emprises artificialisées, dont environ 200 000 hectares urbains construits. Que cela touche des zones commerciales, des locaux d’entreprises, ou bien des quartiers résidentiels, actuellement, 1 Francilien sur 2 vit dans un îlot avec effet de chaleur.
Les conséquences de la chaleur sur le corps humain sont de mieux en mieux caractérisées. On sait notamment que les enfants de moins de 5 ans, les personnes de plus de 65 ans, ou celles atteintes de pathologies sont identifiées comme particulièrement vulnérables. Mais l’exposition à la chaleur touche la population dans l’ensemble, et se manifeste au travers de différents symptômes et signes cliniques :
- Stress
- Augmentation du rythme cardiaque
- Sudation et déshydratation
- Éruptions miliaires (boutons de chaleur) et démangeaison dues à l’obstruction des canaux des glandes sudoripares
- Réduction de l’attention et de la vigilance, confusion
- Œdème de chaleur et gonflement des tissus
- Syncope, vertige et malaise
- Coup de chaleur et perte de conscience
En Ontario, de 2004 à 2010, chaque degré au-dessus de 22 °C a augmenté de 75 % le nombre médian d’admissions à l’urgence pour des malaises et des maladies liées à la chaleur découlant du travail (Fortune et al., 2014).
L’effet direct de la chaleur sur la santé a été directement mesuré via des statistiques et l’indicateur de surmortalité en période de canicule : +141 % de surmortalité à Paris en 2003, + 20,6% en 2020.
Si l’exposition aux fortes températures parait évidente en milieu extérieur, il est toutefois démontré que la température de surface des bâtiments est positivement corrélée avec leur température intérieure. Il a même été montré que la température intérieure peut atteindre des niveaux 50 % supérieurs à ceux de la température extérieure (Lundgren-Kownacki et al., 2019).
Ainsi, que ce soit dans nos habitations, au bureau ou bien sur des chantiers extérieurs il est à attendre des désagréments tels qu’une réduction des heures de sommeil marquées par une forte chaleur (14% de perte de temps de sommeil), mais aussi une perte de productivité de 10 à 20% en raison de difficulté de concentration et de maintien de l’attention.
Il existe également des effets indirects de la chaleur sur la santé, et notamment en lien avec la qualité de l’air que nous respirons. En milieu extérieur, le cumul de l’effet de l’ilot de chaleur et des polluants présents contribue à générer du smog, ce brouillard persistant, car ne pouvant être évacué par le vent. On y retrouve alors notamment de l’ozone et des particules fines, à l’origine de symptômes d’asthme, d’irritations des yeux et des voies respiratoires, ou encore à l’origine de maladies cardio-vasculaires. Concernant l’air intérieur, les températures plus hautes favoriseront la libération des composés organiques volatils (COV), contenus dans les peintures, mobiliers et divers revêtements.
La nécessité d’agir pour enrayer le phénomène des Ilots de chaleur
Il est donc nécessaire d’agir pour préserver la qualité de l’air que nous respirons, réduire les conséquences des fortes températures, limiter les périodes de sécheresse. Les activités humaines sont à l’origine de ces déséquilibres, mais les solutions pourront aussi venir des choix que nous opérons pour identifier et lutter contre les ICU. Il est en effet possible de limiter les ICU, soit à l’occasion de réhabilitation ou modernisation d’aménagements existants, soit dans les projets neufs, en intégrant désormais « à la source » la prise en compte de cet enjeu.
La ville de demain doit offrir un environnement plus sain, en accord avec la nature et les bienfaits qu’elle propose. L’objectif est ainsi de préserver, recréer ces conditions de vie, respectueuses de notre bien-être, de notre santé, mettre à profit les services écosystémiques, les solutions fondées sur la nature et mieux raisonner l’utilisation de ces ressources. Grâce à un éclairage reposant sur une culture scientifique et des outils modernes, il est possible de faire simplement les bons choix et d’intégrer au plus tôt les meilleures solutions pour l’aménagement de nos lieux de vie.
Une première étape consiste à caractériser, identifier ou anticiper les Ilots de chaleur. Où sont situés les ilots de chaleur ? Vos aménagements, vos bâtiments, votre entreprise, induisent-ils un Ilot de chaleur ? C’est bien à cette échelle « micro » que l’analyse peut mener à identifier ce qui contribue à l’effet d’ICU.
Pour y parvenir des données générales peuvent tout d’abord être collectées : profil urbain, mode d’occupation des sols, élévation des bâtiments, types de population sur site, permettant une première appréciation du niveau de risque et de vulnérabilité. Puis, les aménagements sont modélisés, prenant en compte les élévations des éléments structurants, mais également la nature des matériaux ou encore leur exposition. Ainsi, cela permet une représentation initiale du phénomène d’ICU, qu’il est enfin possible de modeler, de modifier en fonction du projet d’aménagement ou de transformation du site. C’est sur cette base que l’on peut discuter et trouver des solutions de verdissement et d’apport de fraicheur.